28 janvier 2015

L’acculturation malienne

Depuis 1968, le Mali assiste à une perte collective de ses repères et à une instrumentalisation de son histoire.

Le drapeau national du Mali. Crédit:com
Le drapeau national du Mali. Crédit:com

L’histoire postcoloniale du Mali est et reste un fait très méconnu par la population malienne et singulièrement la jeunesse. Cette déculturation a atteint son summum le 19 janvier 2015,  en effet, dans son allocution (voir annexe), le président Ibrahim Boubacar Keita a laissé entendre je cite : « Le 20 janvier 1961 est perçu comme marquant le départ du dernier soldat français. » Que nenni ! Comment le président IBK peut-il confondre le 20 janvier 1961, la fête de l’armée et le 5 septembre 1961 la date de départ du dernier soldat français du sol malien ? Diantre est-il conseillé ? Comment pouvez-vous comprendre qu’en 2015,  cinquante-cinq ans seulement après l’indépendance, le président de la République, celui-là même qui se dit historien, n’est pas en mesure de donner la différence entre ces deux dates et événement historiques : la fête de l’armée (20 janvier 1961) et le départ du dernier colonial (5 septembre 1961).

Et pourtant, lorsqu’on pose aux Maliens, la question suivante : Quel évènement majeur s’est-il passé en 1235 ?  Sans hésitation, principalement, ceux qui ont le niveau CEP (Certificat d’études primaires) répondront : la bataille de Kirina qui s’est soldée par la victoire de Soundjata Keita sur le Soumaoro Kanté. Pire, demandez à tout élève malien qui, a eu son baccalauréat l’auteur de la phrase : « La France a perdu une bataille, mais la France n’a pas perdu une guerre. » Il répondra aisément que c’est l’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle sur les ondes de la BBC (British Broadcasting Corporation) depuis Londres.

Les dates et les événements de 1235 et 1940 sont suffisamment connus, mais les faits postcoloniaux, surtout les événements historiques tels que : la fête de l’armée du Mali et le départ du dernier soldat français qui font et qui faisaient la fierté de nos pères de l’indépendance restent et demeurent soigneusement occultés, c’est ce que je mets sous le vocable de « l’acculturation malienne. » Il y a eu une véritable opacité sur l’histoire du Mali indépendant, or Amadou Seydou Traore  nous dit : « Aucun peuple ne peut se passer de son histoire et toute entorse faite à l’histoire d’un peuple est une agression à l’encontre de son patrimoine, donc de l’un des aspects les fondamentaux de son identité nationale ».  C’est juste inadmissible et inacceptable que le Malien a en mémoire la date de la bataille de Kirina soit huit siècles avant l’indépendance et l’appel du 18 juin 1940 et qu’il méconnaît l’histoire récente. Les événements postcoloniaux héroïques font partie intégrante de notre histoire. La présidence de Modibo Keita et l’histoire de la République du Mali l’histoire postcoloniale de notre nation doit être professée à l’école au même titre que l’histoire précoloniale et coloniale. C’est un droit fondamental et primordial pour les tous les Maliens de connaître les actes posés par le président Modibo Keita, le père de la nation malienne.

  • Le 20 janvier 1961 : la fête de l’armée du Mali  

Le  20 janvier 1961, le président Modibo Keita convoqua dans la salle du Conseil des ministres de Koulouba l’ensemble des corps diplomatiques devant lesquels y compris l’ambassade de France. Il s’adressa au pouvoir français à travers son ambassadeur pour évacuer les troupes françaises du territoire malien. C’est la commémoration de ce discours de notre très cher premier président prononcé devant les corps diplomatiques le 20 janvier 1961 que nous célébrons comme fête de l’armée et non  comme le jour de l’évacuation du dernier soldat français du territoire malien.

  • Le départ du dernier soldat français

C’est le 5 septembre 1961 après la descente du drapeau colonial français que le dernier soldat français quitta le Mali. Et c’est ce même jour à la base aérienne de Bamako que le général Soumaré commanda à son tour la montée du drapeau malien pour l’éternité; moment de joie et de fierté. Malheureusement, ce jour historique du 5 septembre 1961, le président Modibo Keita était en déplacement à Belgrade pour la première conférence des Pays non alignés.  Ci-dessous le télégramme qui lui a été envoyé :

Au Président Modibo Keita -Belgrade- ;

« Parti, peuple et gouvernement sont heureux de t’annoncer évacuation totale territoire par derniers éléments des forces armés françaises, ce jour 5 septembre 1961-stop- Sommes fiers de t’avoir comme guide, et cet événement, que tu as préparé avec tant de détermination, est une victoire de plus remportée par le peuple du Mali et son parti, résolument engagés dans le combat pour la paix, la consolidation de l’indépendance et la construction nationale -Stop- Sommes plus que jamais confiants dans triomphe lutte pour l’Unité africaine et coopération fraternelle avec tous peuples.

Fraternellement »

 

Modibo Keita, crédit photo: afribone.com
Modibo Keita, crédit photo: afribone.com

« Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre. » Dixit Winston Churchill. Oublier ces deux événements mémorables, ou encore les confondre ne peut être que de l’ingratitude et de l’indécence sur la mémoire des pères de l’indépendance, les libérateurs du Mali, le président Modibo Keita et ses compagnons.

L’enseignement de l’histoire, surtout de la vraie histoire se présente comme une obligation, car celle-ci permettra au Malien d’aujourd’hui de se reconnaître, de se redéfinir, de se comparer au Soudanais d’hier, de se savoir, d’analyser le monde dans lequel il vit,…

L’enseignement de la vraie histoire du Mali ne doit pas être une option, mais une obligation. Nous ne devons en aucune manière accepter de plus que nos dirigeants falsifient notre histoire  pour non seulement mieux limiter nos visions des choses, mais aussi pour nous transformer en purs consommateurs.

Démuni de sa vraie histoire, le Mali se retrouve être l’objet le plus manipulable

« Nos descendants ont des droits sur nous »

Washington DC, le 28-01-2015

Issa Balla Moussa Sangaré

 

Annexe : 54 e anniversaire de l’armée nationale : Message à la nation de SEM Ibrahim Boubacar Keïta, président de la République, Chef suprême des armées (Koulouba, le 19 janvier 2015). Le lien :https://www.koulouba.ml/54eme-anniversaire-larmee-nationale-message-nation-sem-ibrahim-boubacar-keita-president-republique-chef-supreme-armees-koulouba-19-janvier-2015/

La vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=mgVBIqKco4M

 

Partagez

Commentaires

DOLO Oumar Ampoural
Répondre

Merci mon frère Issa B. M. Sangaré. Le Mali et les maliens sont entrain de "dériver dans le fleuve de l'histoire".
Encore merci de recadrer les faits historiques. Désormais je me joins à toi pour enseigner le mali et son histoire à tous les jeunes que je pourrai rencontrer dans ma vie.
Que Dieu vienne en aide au Mali.

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Soit le bienvenu M. Dolo. C'est un devoir de génération

Moussa Magassa
Répondre

Pour une acculturation s'en est une mon cher. Le Mali d'aujourd'hui souffre de perdition au plus grand degré et ce au niveau de tous les âges. Mais le plus grands souci se trouve au niveau des jeunes.Bref je ne t'apprends rien mais beaucoup reste à faire.

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Malheureusement, la jeunesse malienne a été sacrifiée par nos gouvernants, et cela depuis 1968. Une jeunesse perdue, sans repère....

mandanye
Répondre

c'est le cas de toute l'Afrique je pense qui à un moment donné perd de son identité culturelle

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Alors Vivement une renaissance Africaine!!!!

Boubacar
Répondre

Pour reconstruire le Mali, il faut exterminer les djihadiste. On doit tuer ces terroristes qui utilisent les enfants comme soldat. Les femmes maliennes en colère s'organisent maintenant en mouvements de contestation dans la rue et même sur facebook.
Voir la lettre https://i68.tinypic.com/14o9a8l.jpg

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Merci Boubacar pour la contribution.
Effectivement il est frequent de voir au Mali, les femmes en train de prendre le devant dans certaines lutte sociales. Ici, j'ai en mémoire les événements de 91, et même tout récemment en 2012. C'est bien qu'elle organisent entre elles-mêmes.
Concernant la lutte contre le terrorisme, il sera un combat de longue haleine, ces djihadistes sont trop bien implatés dans le Sahel pas seulement au Mali et ce sont des vrais nomades.

Issa.

Boubacar
Répondre

<a href="https://i68.tinypic.com/14o9a8l.jpg" title=Femmes en colère

Ousman
Répondre

Tuer les terroristes, oui mais les enfants soldats doivent quitté les groupes de terroristes qui les utilisent comme esclave. Les enfants doivent rentrer dans leurs famille et aller à l'école pour aider à reconstruire le mali. Si la jeunesse est sacrifié le mali est perdu. Désertez vos groupes et trahissez vos chefs qui n'ésiteront pas à le faire.

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Merci frère Ousman pour la réaction. En ce concerne les enfants soldats, ils ne sont pas allés de leur propre gré au rang des djihadistes, ils ont été enrollés de force. Il faut également reconnaitre qu'il y a certains d'entre eux qui ont adhérés pour les sommes d'argent qu'on les proposes, à cause de la pauvreté certainement.
Il faut conjuguer nos forces pour aider ces enfants à quitter le rang des djihadistes et après les aider afin qu'ils puisse s' insérer de nouveau dans la vie des civiles.

Idrissa
Répondre

Les djihadistes ne méritent que la mort mais pas nos enfants. Quittez ces groupes désertez, abandonnez vos chefs qui le jour venu vous trahiront pour sauver leur peau. Les enfants soldats doivent retourner dans les écoles pour assurer leur avenir et participer au développement du Mali. Ecoutez les mouvements de femmes en colère qui demande à leur enfant de rentrer à la maison.

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Merci beaucoup mon frère Idrissa pour la contribution.

Comme je viens de le dire en guise de réponse à d'autres réactions, il sera très difficile pour ces enfants soldats de quitter de leur propre gré le rang des djihadistes. On peut d'ores et déjà dire qu'ils ont été reformatés, ils ne pensent plus ou n'agissent plus comme nous. C'est sûr certains ont gagné le rang des terroristes de leur propre gré, certainement à cause du chomage,de la pauvreté, mais cela ne tienne ceux-là doivent quitter les djihadistes sans délai. Pour le reste l'état et ses partenaires doivent mettre tout en oeuvre pour aider ces enfants à regagner leur vie d'Antan, leurs parents et enfin l'ecole.

Aicha
Répondre

La reconstruction du Mali passe par nos enfants. Les enfants que Ag Ghali, Kouffa ou les autres chefs pervers de groupes armés utilisent comme enfants soldats. Ces dégénérés n'ont pas de coeur, l'Islam est un prétexte pour eux, pour s'enrichir quitte à sacrifier nos enfants. La jeunesse malienne est sacrifiée. Tuez les djihadistes et les terroristes mais laissez nous enfants choisir leur destin.

Issa Balla Moussa Sangare
Répondre

Ma très chère Aïcha merci beaucoup pour la contribution.
Tout à fait d'accord avec vous ma soeur: "Tuez les djihadistes et les terroristes mais laissez nos enfants"
Et d'aucuns le savent, l'avenir d'une nation repose sur sa jeunesse.
très généralement en période de guerre ce sont les enfants et les femmes qui sont les premiers victimes, donc il revient à nos autorités d'éduquer nos forces de la défense ainsi que les groupes d'auto-defense pour épargner les enfants en cas d'affrontement. Mieux, préparer au mieux également leurs reinsertions dans la vie civile.

Paul-Louis
Répondre

C'est à cause de ces pervers d'AG GHALI et KOUFFA que le Mali est dans cette situation. Ils représentent ce qu'il y a de pire dans l'homme. Comment peut-on oser utiliser des enfants comme enfants soldats? Pour reconstruire le MALI, nous avons besoin de ces jeunes. Arrêtez de détruire la jeunesse malienne! Ag ghali et kouffa sont des assassins qui mourront comme des assassins. Les terroristes et djihadistes doivent tous finir de la même manière.