Mali : ma réflexion sur le Premier ministre M. Moussa Mara
De l’achat du nouvel avion présidentiel, en passant par la nomination de M. Moussa Mara à la tête de la primature et les récents événements de Kidal, voici ma part de réflexion.
La nomination de M. Moussa Mara à la tête de la primature
Ce soir là, il fallait être un adepte des réseaux sociaux, notamment Facebook et Twitter pour pouvoir contempler l’euphorie suscitée chez les Maliens après la nomination de M. Moussa Mara à la tete du gouvernement du Mali. Il faut également reconnaître que la logique politique aurait voulu un chef du gouvernement issu du parti présidentiel qui est le RPM (Rassemblement Pour le Mali), car M. Moussa Mara est le président du parti Yelema et avec un seul député à l’Assemblée Nationale. Malgré cette incohérence politique, la jeunesse malienne, y compris par ma modeste personne, fut enchantée de la désignation de ce jeune expert comptable comme Premier ministre, qui n’est d’ailleurs plus a présenté sur la scène politique. Ancien maire de la commune IV de Bamako, c’est ce natif de la capitale malienne qui avait mis en ballottage lors des législatives de 2004 l’actuel président M. IBK.
Premier constat : loyauté au président de la République
Tout juste après sa nomination au poste de Premier ministre, nous avons été ébahis par les propos M. Moussa Mara, qui demanda à plusieurs reprises « loyauté au président de la République » et non au pays ou à l’Etat. A mon humble avis, les membres du gouvernement doivent d’abord être loyaux à la nation et cela malgré qu’ils soient au service du président de la République. Je me disais également que le Premier ministre voulait mettre en œuvre des mesures de sincérité et d’honnêteté pour bien servir le pays et le président.
Deuxième constat : la déclaration de guerre
Après la visite ensanglantée et mouvementée du chef du gouvernement à Kidal le 17 mai 2014, M. Moussa Mara avait laissé entendre que : « le Mali est en guerre contre les groupes terroristes et leurs acolytes ». Pour rappel, la délégation gouvernementale avait été attaquée au gouvernorat de Kidal par les groupes armés et terroristes faisant plusieurs morts et blessés. Le chef de file de l’opposition malienne, à savoir M. Soumaila Cissé sur Rfi (Invité Afrique) affirmait, je cite : « Il a manqué de lucidité. On ne déclare pas la guerre à Gao de façon inconstitutionnelle (…) De façon constitutionnelle, le Premier ministre ne peut pas déclarer la guerre. »
Que dit la Constitution à propos de la déclaration de guerre ?
Elle stipule en son article 71 : que la déclaration de guerre est autorisée par l’assemblée nationale réunie spécialement à cet effet. Le président de la République en informe la Nation par un message.
La guerre elle-même étant définie par le dictionnaire comme un conflit armé entre Etats, pays clans… La Constitution n’ayant pas défini la guerre, il revient alors aux constitutionnalistes de nous édifier sur celle-ci.
Troisième constat : L’avion sans papier
Lors de sa déclaration de politique générale devant les élus de la nation, le chef du gouvernement a dit ne pas détenir un seul document qui prouve que l’ancien avion d’ATT est la propriété de l’Etat du Mali. C’était sans compté sur le jeune ingénieur aéronautique Tji Diarra et sur le journal d’investigation Le sphinx. Si le premier s’est arrêté avec une sortie médiatique sur les réseaux sociaux en affirmant que l’ancien avion présidentiel est bel et bien la propriété de l’Etat du Mali, et qu’il était revenu au Mali au mois de février 2012 après avoir passé sept mois à Miami pour une remise à neuf. Le second lui a emboîté le pas en amenant des preuves matérielles : un contrat de vente et d’achat d’aéronef entre Jetline International comme vendeur et l’Etat du Mali comme acheteur avec un certificat de livraison et d’acceptation.
On peut également comprendre que le Premier ministre Moussa Mara ne pouvait se dérober de la question relative à l’achat du nouvel avion présidentiel, car l’Etat étant une continuité. Du haut des ses dizaines d’années d’expérience en tant que expert comptable, c’est difficilement inimaginable que le Premier ministre n’ait pas demandé un audit sur l’acquisition de l’ancien avion acheté sous le régime ATT. Tout laisse à croire qu’on lui a dit que l’ancien avion présidentiel était sans papier mais par qui ?
Il n’est pas un seul car le président IBK dans le Jeune Afrique du 22 mai 2014, avait affirmé concernant la disponibilité de l’avion acquis le régime ATT : « Disponible peut-être, mais hors d’état de voler. Ce 727 a en effet été obtenu dans des conditions d’opacité telles que nous ne disposons d’aucun document ni d’aucune facture le concernant : il semble qu’il aurait transité par la Libye. »
Donc le Premier ministre ne serait pas le seul à donner des informations erronées à la population malienne !
Quatrième constat : l’Etat du Mali, le balayeur balayé
Le président de la République du Mali, M. Ibrahim Boubacar Keita, dans une ses allocutions au début de son mandait avait laissé entendre que « l’année 2014 serait placée sous le signe de la lutte contre la corruption. » L’état du Mali dans sa lutte contre la corruption, à contre-courant vient d’être épinglé par les institutions de Bretton Woods, particulièrement le FMI (Fonds Monétaire International). En représailles de l’opacité de l’acquisition du nouvel avion présidentiel et des contrats passés sans appel d’offres entre le gouvernement et des sociétés privées, le FMI a décidé de geler pour le compte du mois de juin le décaissement de ses fonds pour le Mali jusqu’au mois de septembre de 2014. Pis, le décaissement pour le mois de septembre prochain est conditionné à un audit préalable par les équipes du FMI d’après l’AFP (Agence France Presse) du 19 juin 2014.
D’apres Tiken Jah Fakoly, c’est le balayeur balayé.
Il ne faudra pas être expert en économie pour savoir qu’il était inopportun dans le temps, la forme et même la manière de l’acquisition de ce nouvel avion présidentiel. Notre pays sort d’une crise sociopolitique sans précédente, les caisses sont vides, l’Etat malien était est toujours sous perfusion internationale.
Conclusion
Cher M. Moussa Mara, Premier ministre et chef du gouvernement du Mali, l’appréciation d’un œil extérieur est souvent nécessaire dans le but d’une réflexion saine et objective. N’étant pas membre du parti Yelema qui est le vôtre, ni d’aucun parti d’ailleurs, je me suis donné une obligation de dresser une petite réflexion objective couronner par mes modestes propositions.
En corollaire, je vous prie de tenir compte des points esquissés ci-dessus, notamment dans le deuxième et troisième constat. S’il s’avère qu’il y a eu des écarts involontaires ou volontaires dans votre conduite de fonction, je pense tout humblement qu’il sera mieux de présenter vos excuses à vos partisans et à la population malienne.
M. Moussa Mara, vous êtes arrivé à la tête de ce gouvernement politiquement clean, et il faudra ressortir comme vous êtes arrivé tout clean également.
Vous devriez vous souciez de votre avenir politique, car il sera trop tôt et de le laisser étancher par quoi que ce soit.
M. le Premier ministre, qui est-ce politique malien pendant ces deux dernières décennies qui n’a pas délibérément ou spontanément dire des propos fallacieux ? Reconnaître son erreur c’est également une grandeur, c’est aussi être un homme.
Vos critiques et suggestions sont les bienvenues.
Une contribution de Issa Balla Moussa Sangaré
Washington DC, le 25-06-2014
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